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tic... tac
14 mai 2010

comme une bulle de savon. PLOP.

J'ai l'impression d'être arrivée en bout de parcours. J'ai presque pas décollé de ma chambre depuis une semaine, contacts sociaux minimum se résumant à jouer à la ps3 avec mon frère - tu parles d'une sociabilisation. J'écoute du jazz alternatif et il pleut non-stop depuis début mai, mon moral s'est assorti à la couleur du ciel, mes mouvements ont fini par se coordonner à la pluie, je virevolte dans les courants d'air puis je finis par tomber. Inéluctablement.
Il me faudrait un cigare, un verre de rouge, je me coulerais un bon bain brûlant bien mousseux et je finirais par me trancher les veines avec le rasoir de papa, comme dans un roman. Quand on retrouvera mon corps, l'enquête concernant ma mort se conclura avec la découverte, sur la table du salon, de Flowers for Algernon de Keyes, d'un jeu de tarot incomplet et d'une bouteille de Baileys presque finie.
L'énigme piétinera un bon moment avant que quelqu'un, quelque part, ne comprenne.

Je ne suis pas réellement en bout de parcours. Mais j'entre en panique quand il s'agit de mon avenir, et comme je m'évertue à tuer toute pensée en rapport avec ce que je compte faire de ma vie, et bien l'avenir n'existe plus vraiment. Je vis au jour le jour involontairement.
Arrive un moment où il faudrait que je m'insère dans la vraie vie, celle des responsabilités, il faudrait que je passe enfin mon permis, me prenne un appart', trouve un boulot, me retrouve seule avec six chats dans une maison à l'abandon après un divorce houleux et la mort accidentelle de mon fils de douze ans.
Je n'ai pas vraiment envie d'en arriver là, je préfère être bloquée dans le présent. Mais je viens de passer ma licence et il serait temps que je me lance dans un diplôme vraiment utile...

En me relisant je me dis que le discours de S. devait ressembler à ça. Je ne connais pas S., je ne me souviens même pas de son prénom, mais pour cet article ce sera S. Comme Sara. Oups. Bref, ce n'est pas vraiment important.
Quel que soit son nom, S. s'est jetée d'une fenêtre il y a quelques mois. Elle allait visiblement mal depuis des années, et N. m'a dit qu'à chaque fois qu'il recroisait sa route, son avenir semblait de plus en plus flou. Elle ne savait plus, elle se laissait porter sans grande conviction. Plus de volonté, plus de désir, plus de plaisir. Et elle a profité d'un soir - un des rares soirs - où son copain n'était pas resté auprès d'elle, pour sauter le pas, ou plutôt, la rambarde.
S. n'est même pas morte, elle se retrouve paraplégique à 21 ans.
J'ai un mal fou à concevoir l'horreur que cela doit être pour elle. Vous n'en pouvez plus, voulez mourir, réussissez miraculeusement à franchir le pas et finalement vous vous réveillez dans un hôpital avec l'incapacité de pouvoir bouger vos mains et vos jambes. Votre copain vous nourrit. Une infirmière vous emmène pisser. Vous ne pouvez probablement plus remonter votre culotte vous-même. Et tout ces gens sont tellement compatissants et cherchent à vous aider dans la plus totale sincérité.
Mais vous, vous vouliez mourir. Et aujourd'hui on vous force à réapprendre à vivre.
J'aimerais vraiment connaître S. et discuter avec elle, essayer de la comprendre, comment elle gère tout ça. Pourquoi elle a fait ça. Pourquoi aujourd'hui elle semble redonner une chance à la vie alors qu'elle a perdu sa propre autonomie.
Mais je n'ai aucun contact avec S., moi je connais N.
Une légende court sur les étudiants en psychologie, il semblerait que nous soyons tous barges et que plus ou moins inconsciemment nous nous lancions dans ces études pour nous guérir nous-mêmes. Après trois années de licence, je confirme que certains d'entre nous ont du niveau mais finalement je pense que ceci peut être généralisable à la population toute entière, on le remarque juste plus chez les psychos. Parce qu'on est en psycho. Toutefois, il se peut aussi qu'une histoire personnelle particulièrement éprouvante pousse à aller en psycho plus qu'en études vétérinaires, mais ceci ne signifie pas que les autres filières soit exemptées de tarés. Enfin bref.
N. ne se remarque par aucune tare particulière. N. semble sain, plutôt bien dans sa vie, et dans sa tête. Le problème de N., c'est son entourage. Je n'ai jamais rencontré personne ayant une liste aussi longue de tentatives de suicides plus ou moins ratées dans son cercle d'amis. N. attire peut-être les gens à problèmes, par sa grande compassion et son habilité à écouter en silence. Je ne sais pas. J'espère que le fait que N. soit devenu mon ami ne signifie pas grand chose dans ce sens-là, et que je ne deviendrais pas une nouvelle S. Et qu'aucun d'entre vous ne rentrera dans le cercle d'amis de N.

Enfin bref, encore un article déprimant et sans conclusion.

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Commentaires
T
Mais il est passionnant ton article. Il est triste, mais bien écrit. :]
G
Bon courage Ether.<br /> Pour comprendre et trouver.<br /> <br /> Je travaillerais moi-même en novembre prochain en tant qu'infirmière, ça me semble comme un autre monde qui m'attend.<br /> J'ai pu cotoyer des centaines de gens, au décours de mes stages, qui étaient déjà en poste. Et leur vie me parait ennuyeuse, banale, rythmée seulement de vacances rituelles, organisées ; et sans aucune ouverture vraie sur l'extérieur... Je n'ai pas envie de ça.<br /> <br /> Grande perplexité, donc. Grand vide.<br /> <br /> Je sais, ça ne t'aide pas tellement tout ça... Quoique...<br /> <br /> Enfin, toi seule peut me le dire (n'hésites pas à boycotter les commentaires inutiles).
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